J'apprends par Morgan Pokée la mort de Stéphane Bouquet. C'était un critique de cinéma (parmi d'autre activités) que j'admirais beaucoup et j'ai appris beaucoup en essayant de mieux comprendre comment il voyait et penser à propos le monde. On pense à lui et ces proches aujourd'hui. - D.D.
***
« Je pense quand j’étais aux Cahiers, c’est-à-dire essentiellement pendant les années quatre-vingt-dix, on était dans une logique qui était plus représentatif de la société dans laquelle on vivait. C’était une logique plus individualiste où il y avait moins une espèce de ligne esthétique, politique. Il y avait une logique plus individualiste, de goûts propre, manière d’aimer les films, et perspective sur le cinéma. Il y avait une affirmation de la subjectivité qui était beaucoup plus forte qui fait que ça se dispersait plus. » – Stéphane Bouquet
Stéphane Bouquet est une figure représentative des années 90 aux Cahiers. Il entre dans la revue à l’âge de 25 avec une première contribution dans le numéro d’octobre 1993 avant qu’il entre dans la rédaction en janvier 1995. Après ceci, il serait un rédacteur régulier jusqu’à 2000 quand il commence à contribuer moins même s’il resterait toujours dans le comité de rédaction. Quand Jean-Michel Frodon deviens le « directeur de la rédaction » en septembre 2003 et puis Emmanuel Burdeau devient le nouveau rédacteur en chef, Bouquet serait un des seul de la vieille rédaction qui reste-là et en janvier 2004 entre dans le « conseil éditorial ». Même si c’est un rôle symbolique et qu’il ne contribue pas d’une manière régulière, son nom reste toujours là pendant presque l’entièreté de cette période jusqu’à mars 2009, le dernier numéro de Burdeau comme rédacteur en chef, quand la revue est en vente.
Une particularité de Bouquet c’est sa longévité qui se passe autour d’alliances avec d’autres rédacteurs de sa génération et les différents rédacteurs en chef. Quand il parte finalement, il aurait été là à travers cinq différentes rédactions. Les années 90 sont une décennie délicate ou les rivalité son tranchant entre rédacteurs, génération et rédacteurs en chef. Bouquet est à la fois représentatif des années 90, car il est dans le flux de ce mouvement et tisse des liens avec ses confrères, mais aussi hors-normes, car il y a toujours l’impression d’un écart entre lui et les autres, et d’une manière surprenante, il est capable de traversée les différentes rédactions, ce qui n’est pas nécessairement évident.
Car une qualité de la deuxième moitié des années 90, ce période « entre » différents rédacteurs en chef – du départ de Jousse en janvier 1996 (couverture « Dead Man ») et la reprise de Toubiana le mois prochain, et puis la période de Baecque entre octobre 1997 jusqu’à mai 1999, et finalement Tesson – c’est qu’il y a plus de rédacteurs qui partent – ou entrent et puis partent – que ceux qui vont y rester à long termes.
En premier, il y a la génération de rédacteurs de la période Jousse qui partent (Nevers, Vatrican, Bredier, Morice, Rauger, Taboulay, Malandrin, Strauss, Ostria), et après, dans les années qui suivent, il va avoir des autres rédacteurs, qui soit ont juste entrer ou vont bientôt entrer, qui reste seulement pour une année ou deux (Toulza, Le Forestier, Cantaloube, Roth, Beau, Ede, Richou, Hachard, Bénoliel, Orléan, Vasse). C’est beaucoup de gens et les raisons pour leur départ n’est jamais claire. Tout cela donne l’impression qu’antérieurement, dans la période Jousse, qu’il avait une bonne cohabitation dans la revue, de rédacteurs qui s’entendait bien entre eux-mêmes et avec le rédacteur en chef, qui ne serais plus être le cas dans les années qui suivent. Le fait que beaucoup de gens ne vas pas être capable de s’intégrer, et que la rédaction aurait des avis assez opposer, donne plus l’impression d’un climat hostile et de rivalité fraternelle. C’est un peu l’ère « Jerry Springer » de l’histoire des Cahiers. Mais, en même temps, c’est dynamique et cela ressemble à une crise de jeunesse qui est représentatif de ces années.
Une raison qui explique la longévité de Bouquet c’est sa fidélité à ces pairs et ces rédacteurs en chef. Comme rédacteur, il va avoir de multiple qualité qui lui fait désirable pour ceux qui sont responsable de la revue. Il serait respectueux de cette dette qu’il aurait envers eux. Cela se passe par un achèvement de responsabilité et tâches, mais aussi une adhésion envers ceux en pouvoir.
Ces deux grandes périodes seraient ceux de Jousse et de Baecque. Du premier, Bouquet offre un style d’écriture littéraire qui participe à une prose jouissante. Du deuxième, Bouquet offre un goût pour un cinéma littéraire et transversal.
De la période « entre », du retour de Toubiana, Bouquet se souviens :
Quand il est revenu, en fait il y a une révolte de la rédaction parce qu’on ne trouvait pas normal que ce ne soit pas quelqu’un de notre génération qui prenne le pouvoir et que lui veuille revenir pour reprendre le pouvoir. Et on trouvait que l’histoire des Cahiers, cela n’avait jamais été ça en fait. L’histoire des Cahiers c’étaient des générations qui se passaient le pouvoir les unes après les autres… Si je suis honnête, quand Serge Toubiana est revenu, nous on avait proposé un contre-projet où il y aurait eu un triumvirat : trois rédacteurs en chef ensemble, un groupe. Cela n’aurait jamais marché parce que les triumvirats, on a vu dans l’histoire romaine cela n’a jamais marché. Mais l’idée c’était qu’on serait trois rédacteurs en chef. Et après j’ai abandonné cette proposition.
Cet abandonnement de ce projet d’un triumvirat de rédacteurs en chef et soumission aux ordres de Toubiana serait apprécié et réciproquer par un bienveillance et protection. Car même dans la période Tesson, qui lui appréciais moins, Bouquet été capable de continuer à cause de son histoire-là et à cause de son amitié avec le co-rédacteur en chef, Jean-Marc Lalanne.
Bouquet va avoir une fidélité envers ceux de sa génération qu’il a traversées les Cahiers avec, notamment les deux jeunes rédacteurs en chef qui s’impose. En premier, Jean-Marc Lalanne, qui, quand il est le rédacteur en chef, donne Bouquet une chronique (parfois controversée, comme son article « So SAD »), et Bouquet serais, plus tard, responsable avec lui d’écrire un livre sur Gus van Sant (Éditions des étoiles). Et après, Emmanuel Burdeau, qui est responsable pour que Bouquet reste dans la revue dans le « conseil éditorial », plus tard, après cette période, quand avec Thierry Lounas et leur bande créer leur propre maison d’édition et production Capricci, Burdeau serais responsable d’inviter Bouquet à publier un long feuilleton là, une polémique contre Clint Eastwood (Clint ‘Fucking’ Eastwood).
Filiation : L’Enfant sans père
« Je ne suis pas sûre que j’ai envie d’avoir un père… Je suis tout prêt à reconnaître que mon intelligence humaine, au sens de l’intelligence des sentiments, de l’autre, et à peu près nul. » – Stéphane Bouquet
Dans le film La traversée (2001) – un documentaire sur Bouquet par son collaborateur artistique Sébastien Lifshitz – ils vont ensemble au fond rural de l’États-Unis pour essayer de rencontrer le père de Bouquet qu’il n’a jamais connues. Dedans, Bouquet dit cette curieuse phrase citée. Cela témoigne, je crois, trois qualités particulières à Bouquet : que, grandir sans un père, l’idée d’avoir un ne semble pas lui intéresser guère et qu’il croit son « intelligence humaine » est « à peu près nul », avec le sous-entendu qu’il se définit plus par son intellect.
Cela explique peut-être un peu le rejet de Bouquet d’une notion d’un famille hétéro-normative et culture patriarcale. Son itinéraire individuel serait même l’opposée de cela : quand il est jeune adulte il est initié dans le milieu queer parisien (c’est là où il a rencontré Sébastien Lifshitz). Bouquet se souvient :
Nous nous sommes rencontrés dans une association d’étudiants gay il y a plus de vingt ans. L’homosexualité n’était pas du tout dans l’état d’acceptation sociale où elle est aujourd’hui. Cette association était très intello, toutes les semaines y était invité un intellectuel, un artiste, un cinéaste pour une conversation : Patrice Chéreau, Edmund White, André Téchiné… tout le gratin de l’art homosexuel (et pas seulement d’ailleurs) de l’époque.
Ça c’est son formation autobiographique et intellectuel qu’il apporte au Cahiers. Ça explique un peu pourquoi Bouquet serait moins dans un désir de filiation avec un figure paternel, et au lieux plus indépendant et solitaire. Il serait plus conscient et sensible à des idées centrales du féminisme et du gender studies. Cela se passe aussi par ces modèles-critiques – il cite habituellement deux femmes, Colette Mazabrard et Laurence Giavarini – et comment il utilise les théories de Laura Mulvey sur le « male gaze » – qui dénonce les stéréotypes féminins dans le cinéma et rapport de pouvoir déséquilibré – dans son travail critique.
C’est intéressant, par contre, de comparer Bouquet à son confrère de la même génération, Jean-Marc Lalanne, en termes de leur relation a une certaine idée de la filiation, que cela soit dans les œuvres qui les marques ou leur position dans les Cahiers durant les années 90. Où pour Lalanne, il y a un reproche des figures paternel toxique dans les œuvres qu’il écrit à propos (La Promesse, Sitcom) et dans la revue il préfère créer une communauté dans les marges du rédacteur en chef. Ceci n’est pas le cas pour Bouquet. Aux lieux, Bouquet fait un pas à côté de la question d’une filiation, et s’intéresse plus dans des œuvres plus individualiste et métaphysique, d’un rapport au monde non-encombrer par des rapports familiaux. Ceci est aussi, je crois, son rôle dedans la revue, il revendique être plus indépendant, minoritaire et à l’écart du consensus. On a l’impression qu’il n’aime pas faire partie d’un groupe. Et comme il le dit sur le cinéma qui l’intéresse, « L’art fabrique du seul, du « minoritaire » comme disait Deleuze, éventuellement du peuple intérieur. »
Cet écart explique aussi sa longévité. Car il est moins parti-preneur dans les tendances centrale, il peut continuer à flotter entre les différentes rédactions. Et c’est à mentionner qu’il y a aussi d’autres travail et activité artistique et qui lui paye, qui contribue aussi à son écart là.
Un cinéma philosophique
Tout cela pour dire que Bouquet serais indépendant envers et à l’écart du centre des Cahiers. Car même s’il y a une fidélité envers le groupe, il participe d’une manière individuelle, sans nécessairement soumis par la pression des autres. C’est à remarquer que trois de ces récurrent intérêts son hors-normes pour la revue : il défend un cinéma littéraire, rejet l’idée de la « politique des auteurs », et y apporte des théories américaines. Et même s’il peut être élogieux envers certains films – et même parfois vraiment élogieux –, Bouquet serais peut-être plus fort quand il est dans la négativité, en se positionnent « contre » des œuvres médiocre et superficielle. Cela serait un de ces marque déposée. Ou les Cahiers se définissait historiquement régulièrement par rapport à un cinéma américain industrielle, Bouquet serais plus à l’opposé de cela : il écrit rarement sur le cinéma américain (peut-être à l’exception de son critique de Scream), et comme il le dit lui-même, « J’ai un côté un peu français élitiste et la culture populaire ça ne m’intéresse pas beaucoup. » Bouquet a des critères assez sévères et peut être même intimidant avec son tranchant. C’est un propos qu’il reconnait lui-même, « Il fut un temps où j’étais critique et même un peu trop critique d’un peu trop de tout. » Cela fait quand il écrit à longueur sur des films et dit du bien c’est vraiment précieux.
Bouquet atteint vraiment son crescendo dans la période de Baecque. Car un des vrais apports de Bouquet serais de résister aux tentatives d’un cinéphilie à la française et son fameux « politique des auteurs », et au lieux il va apporter des nouveaux discipline et théorie pour analyser le cinéma. Cela inclus sa formation dans la littérature et la philosophie, ces expériences dans la dance contemporaine, expérience dans le milieu queer parisien, intérêt pour la théorie cinématographique américain, et investissement dans l’art contemporain. Tout cela fait que quand de Baecque devient le rédacteur en chef, Bouquet serais un de ces rédacteurs idéal.
Bouquet apporte un rapport théorique au Cahiers, en particulier des modèles intellectuels comme les « critical theories » et « gender studies » des universités américaines.
L’idée qu’un film est un « fait social total », un terme qu’il prend du sociologue Marcel Mauss, permet l’analyse de films hors des contraints d’un « vision d’un auteur ». Ça permet de les mettre en rapport avec des enjeux sociaux plus vaste. C’est une manière de prendre en compte que l’industrie cinématographique a toujours exclue certaine minorité, et qu’avec la montée de films par plus d’eux, qu’il y a de nouveaux histoire et gazes qui ressort.
Le texte de Bouquet sur Oublie moi représente un programme d’un cinéma féministe. Il écrit :
Conséquence : elle n’oublie pas ni ne se laisse oublier, reparaît toujours, n’importe où, n’importe quand, s’impose, s’incruste. C’est d’abord cette insistance qui frappe dans le très beau film de Noémie Lvovsky, une façon pas commune de vouloir être là pour tenir sa place face à l’autre, aux autres, pour les confronter à sa présence, les obliger à faire avec, ne pas devenir un corps en trop. Dans ce but, Nathalie a une arme : la parole.
Regardons à les films et cinéastes que Bouquet écrit à propos : sans compter ces textes cannois – il participe au moins trois fois (1995, 1999 et 2001) –, Bouquet écrit environ soixante-dix critiques et même moment pour les notules. C’est un signe de sa longévité qu’il écrit tellement et sur tellement de différents cinéastes importants à la revue. Bouquet écrit sur les suivant auteurs importants pour la revue : Assayas, Audiard, Blain, Botelho, Breillat, Chéreau, Costa, Craven, Cronenberg, Oliveira, Denis, Egoyan, Green, Guédiguian, Hartley, Hou Hsiao-hsien, Straub et Huillet, Ivory, Wong Kar-Wai, Kerrigan, Spike Lee, Lvovsky, Makmalbaf, Ducastel et Martineau, Monteiro, Moretti, Nicloux, Noé, Nolot, Pollet, Satyajit Ray, Resnais, Ruiz, Schmid, Sokourov, Tarr, Téchiné, Gus van Sant, Vinterberg, von Trier et Wiseman.
Résister le présent
« Et regarder, par contre, Paris. Paris, c’est Lumière. Alors là, vraiment, on comprend tout. Parce que Paris, alors, c’est vraiment Proust, c’est vraiment le 19ième siècle tel qu’on l’imaginer, et tel que les Américains le montre pour l’Amérique. C’est le Paris de l’époque vraiment, c’est le Paris de l’élégance. Voyez : « ce n’est pas une blague, on ne nous a pas raconter une blague, c’est vraiment Paris. » C’est le Paris de l’élégance. » – Henri Langlois
Cette citation d’Henri Langlois, d’un entretien sur les frères Lumières mené par Éric Rohmer, est significatif pour définir les origines du cinéma comme un phénomène française. Cela témoigne des rapports entre le cinéma et le réel et l’imagination mais aussi à sa capacité d’illustration de la littérature. En particulier ici, sur les correspondances entre les actualités des frères Lumières à une certaine idée de la culture française comme le décris Proust.
La raison qu’il est cité, c’est car, avec Bouquet, on est plus dans ce vieux monde historique, d’un éternel retour en arrière, par les sujets et films qui l’intéresse mais aussi par son style d’écriture qui ressemble plus à celui de Proust que celui de son temps. Cela se passe par les films qu’il aime – il y a beaucoup d’adaptation littéraire –, mais aussi une écriture plus philosophique qui rejet des références contemporain. Le style d’écriture de Bouquet est primordial car il apporte un « intemporalité » à la revue, quasiment 19ème siècle.
Il y a quelque chose de Bouquet qui résiste le présent. Ces textes donnent l’impression d’être dans le passé, d’être même écrit dans le passé, même s’ils sont écrits bien sûre dans le présent. Ou d’autre rédacteurs semblent chasser une certaine définition du contemporain et des nouvelles conceptions du visuel, Bouquet est plus anachronique et résiste à cela.
Cela n’est ni passéiste ou nostalgique – d’un retour en arrière à un monde social lointain qui était « meilleur » –, mais plus par un désir d’épurement, d’une retourne à un mode de vie antérieure, sans tout le « bruits » du monde contemporain, pour essayer à saisir ce qui est élémentaire du pensée et comportement humain, pour le but d’essayer de saisir c’est quoi les émotion individuel et relation sociaux qui sont toujours vrais.
C’est une manière de parler du présent par le passé, sans un dégage décoratif-culturel, mais par des sentiments et relation sociaux pure épurée. Cela est apparent quand Bouquet écrit sur tous ces « period pieces », disons films historiques, que cela soit des films de Manoel de Oliveira (Party, Voyage au début du monde, La lettre) ou James Ivory (Remains of the Day, Surviving Picasso).
On le voit aussi quand Bouquet écrit sur deux de ces cinéastes de chevet : Jean-Daniel Pollet et Béla Tarr.
Bouquet écrit sur Dieu sait quoi, l’adaptation de Pollet d’un texte de Francis Ponge,
On n’est pas obligé de trouver que cette critique de l’univers moderne qui a oublié le monde premier, ne sait plus entendre les choses muettes, est ce que le film a de plus fort… C’est même d’autant moins intéressant que gît ailleurs dans Dieu sait quoi une autre angoisse, plus sourde, moins déclamatoire et autrement vitale. Angoisse liée à la solitude ontologique de l’homme, à sa séparation irrémédiable d’avec l’unité de la matière à cause du don maudit de la parole qui l’éloigne de la mutité et de l’évidence des choses ; angoisse liée à l’absurdité de son existence.
Et sur Béla Tarr, Bouquet écrit,
Il y a deux ou trois choses que Béla Tarr sait du monde et de l’homme (il les a apprises en cours de route, et nous avec) : que ça ne va pas, que ça n’ira pas mieux, que ça ne peut pas aller, quoi qu’il arrive. Toucher au plus juste, au plus profond, du mal-être, voilà où se dirige le chemin splendide de Béla Tarr… L’espace et la distance sont le cœur du cinéma de Tarr comme ils l’étaient chez Cassavetes. Comment être avec les autres, les suivre dans leurs gestes, ne pas les perdre, comment éviter que l’espace entre deux êtres, la séparation des corps, ne deviennent une frontière infranchissable, une barrière indépassable, comment annuler la distance ? … La seule différence, mais elle est de taille, est que chez Cassavetes ces choix esthétiques réussissent à faire toujours circuler quelque chose entre les êtres (les fameux flux, d’amour, de désir ou de mort), alors que Béla Tarr est trop désespéré pour croire à la capacité des hommes, ou à celle du cinéma, à surpasser la solitude ontologique. C’est alors qu’il renonce à se tenir si près des hommes, c’est alors que la métaphysique surgit sur la scène du cinéma tarrien.
Il y un côté scène de théâtre ou de dance à les films qui lui intéresse : comment dans un lieu restreint, un corps peut s’engager avec des autres et un espace pour créer quelque chose de juste et de vrais. Il a quelque chose entre le minimalisme et la métaphysique des œuvres, quasi- Beckettiens, qu’intéresse Bouquet et qui ressort dans ces textes sur eux. Sa formation dans la dance lui aide à formuler cela, « Poétique de la Danse contemporaine, excellent livre de Laurence Louppe, pourrait aider le théoricien néophyte. Louppe le dit elle-même : « (sans savoir), le cinéma utilise des états de corps ou d’espaces qui s’enchâssent selon des processus essentiellement chorégraphiques. » »
Les textes de Bouquet ont une qualité de théâtre ou les luttes d’un individu se passe dans un lieu sans hors-champs. Cette impression d’abstraction fait pensée à la scène de The Birds d’Hitchcock : d’un « gods-eye view », d’une perspective du ciel, sur un quotidien de chaos, ou les oiseaux attaque les gens. C’est une qualité d’autorité et austérité artistique propre à Bouquet, non-sentimental, ou il met en valeur une violence social qui traverse l’histoire du cinéma.
Et pour essayer à d’écrire ce « vérité » humain, entre une poésie et une noirceur, Bouquet fait régulièrement référence à des idées bibliques, de l’origine de la philosophie (d’ancien Rome et Grèce), de la littérature et la culture avant le XXème siècle. Tout cela donne un ancrage historique à la revue, et lui donne l’impression d’une sens de « morale » qui vient de lointain. Par exemple, j’aime bien cette citation de Bouquet :
Soyons lucide : le danger ne concerne pas seulement l’état des mœurs. Lorsque la monnaie sera totalement électronique et transitera seulement sur de tels réseaux qu’Internet, qui contrôlera les flux financiers, qui maîtrisera la création monétaire, qui aura le pouvoir financier ? L’État, les banques (virtuelles ou non) ou deux ou trois opérateurs de réseaux ? Et que pourra le peuple ? Ce n’est pas sûr, mais les nouvelles technologies pourraient bien ouvrir une ère de régression.
Cette citation vient de 1996 même si on peut également l’appliquer au monde d’aujourd’hui. À travers elle on peut focaliser sur une des grands gestes de Bouquet : une forme de résistance à un monde qui avance trop vite – trop dans le virtuel, la numérisation et l’hyper-connectivité –, qui oublie un peu trop l’humain, le corps, les relations entre les gens, et une forme de communauté, le présent immédiat, et ce qu’y est devant nous, un histoire et humanité partager, qui peut aider à vivre et à la réflexion.
Il y a quelque chose d’un « pureté » dans le regard et propos de Bouquet. Il a une conviction éclairée des rapports au chose – qu’on verrais peut-être d’une manière plus directe plus tard dans son travail sur la dance et poésie. Dans un monde qui deviens plus en plus hyper-médiatisé, ou la technologie commence à remplacer le contact humain, corps à corps, les idées de Bouquet deviens plus et plus prescient.
Tout cela pour dire, que les contributions de Bouquet aux Cahiers est un achèvement significatif.
No comments:
Post a Comment